Mon autopsie – Jean Louis Fournier

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Fan « absolu » de Jean-Louis Fournier, je ne pouvais pas passer à côté de son dernier ouvrage Mon autopsie que j’ai eu la chance de découvrir en avant-première en juin dernier à la journée de présentation de la rentrée littéraire organisée par les éditions Stock à l’Institut du Monde Arabe.

Je remercie les éditions Stock et plus spécifiquement Valentine pour cette belle opportunité et sa confiance.

L’auteur est clivant : on aime ou on déteste. On se précipite ou on fuit.

D’aucuns le trouveront prétentieux, imbu de sa personne et le critiqueront sans le lire. D’autres adoreront sa manière d’écrire, sa dérision et son humour si souvent noir mais qui nous fait également si souvent sourire.

« Je vais l’appeler Egoïne. Elle est entrée dans ma vie avec une lame. Peut-être d’abord celle d’un coupe-papier pour mes libres, maintenant avec une scie, pour en savoir plus. Après avoir découpé mes libres, elle va me découper en vrai. Tailler dans le vif du sujet. Elle va écrire mes mémoires avec son bistouri. »

Dans mon autopsie, il adopte un point de vue aussi original qu’atypique pour retracer les grandes étapes de sa vie. Il fait don de son corps à la science et au fur et à mesure de sa propre découpe, il aborde des sujets plus ou moins privés, plus ou moins sensibles, plus ou moins tristes.

On retrouve son écriture si fine, si subtile, si expressive. Que de tendresse, d’amour exprimé pour sa femme et ses proches, de poésie.

« Quoiqu’elle fasse, qu’elle me coupe, me scie, m’incise, me dépèce, me dépiaute, m’écorche, me vide, me raccourcisse, qu’elle m’écorcobalisse… Egoïne a des gestes d’une suprême élégance. »

Mais également des analyses sur le monde actuel, sa famille (et on connait notamment  le handicap de ses deux garçons et ses plaies jamais refermées, ses blessures dues à la méprise de sa fille, objet de multiples écrits de sa part).

« Plus grand j’ai fait pire, j’ai brisé des ailes. C’était dur d’exister à côté de moi, je voulais être le seul à voler. Je ne voulais pas partager le ciel. »

Honnête (ou pas…), il fait réagir son lecteur et le conquiert par sa sincérité, sa décence et son réalisme. Plaire, son obsession.

« J’aurai gardé très tard une grande naïveté, même très vieux, j’espérais continuer à plaire. Je mettais grand soin au choix de mes vêtements, je choisissais des couleurs vives. Comme si un pantalon en velours jaune et un pull en alpaga bleu myosotis allaient faire oublier les dégâts du temps et je mettais du sent-bon pour masquer l’odeur de naphtaline.».

Comme à son habitude, les pages sont souvent très peu remplies. 1, 2, 3 phrases… Des coups de canif, des caresses de félin, des questionnements métaphysiques ou pensées philosophiques… Elles se tournent vite. On se délecte de musique, de culture ; on sourit aux blagues ou autres jeux de mots réfléchis.

Le style parait simpliste mais est assurément très travaillé. Le choix des mots est important cela se ressent. Certes parfois il force le trait, il se met en avant, fait la roue et cherche à éblouir. Mais jamais d’affirmation sans justification, il n’assène pas de grands principes que chacun doit croire. Il y a toujours cette impertinence caractéristique, cette ouverture d’esprit, cette volonté de faire réfléchir.

« Même si parfois le chant d’un violon me faisait perdre la tête, elle restait la basse continue de ma musique. »

Ni trop, ni trop peu, tout ce qui me plait chez cet homme : jamais on ne s’ennuie. Jamais on ne regrette l’investissement dans ces ouvrages. J’en suis toujours ressorti apaisé, rasséréné et porteur de bonne humeur.

Je ne suis certainement pas objectif, c’est rare dans mes billets et je m’en excuse par avance. Mais je ne peux que vous conseiller de passer deux heures sur un banc au soleil, au coin du feu avec un plaid sur le corps ou tout simplement dans les transports. Je suis persuadé que vous ne serez pas déçu.

En effet, comme le dit si bien ce talentueux auteur, et cela sera ma conclusion :

« Seulement maintenant, je prends conscience que le but de ma vie a été toujours de faire rire et de faire pleurer, d’émouvoir. Ma hantise était l’indifférence, passer inaperçu ou, pire, ennuyer. »

Amen !

A la prochaine Jean Louis !

 

5/5

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