Ne plus jamais marcher seuls – Laurent Seyer

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Deux ans après le très réussi Les poteaux étaient carrés, Laurent Seyer publie Ne plus jamais marcher seuls, son deuxième roman aux éditions Finitude.

Ayant particulièrement apprécié à la fois la lecture et la découverte de cet auteur, et étant frustré par l’arrêt des compétitions sportives, je ne pouvais pas laisser passer cette occasion.

Je remercie Laurent Seyer, Emma et les éditions Finitude pour m’avoir offert la possibilité de le lire en avant-première.

« Peut-être parce que nous étions différents, justement, et que cela m’intéressait de pouvoir partager quelque chose avec vous, alors que rien, mais vraiment rien du tout ne semblait nous y prédisposer. Ce sont des moments qui ont de la valeur, on pourra s’accrocher à leur souvenir quand on doutera de nous-mêmes. On pourra se rappeler qu’à un moment de nos vies, on a été capables de cela, de ce genre de partage, de ce genre de communion. »

Deux personnages que tout sépare

La citation ci-dessus résume bien l’état d’esprit. Naomi Strauss est parisienne, journaliste à la Voix, et plutôt bobo. Nick Doyles est chauffeur taxi à Liverpool, grand supporter des Reds « of course » et résolument pro-Brexit. Une bourgeoise et un prolo, snobisme vs populisme, une frenchy et un british « rural traditionnel », une idéaliste et un pragmatique, …

À la suite d’une défection au journal, Naomi se propose pour réaliser l’interview à Liverpool de Nick dans le cadre d’un article sur le Brexit. Elle se rend sur place et la moins que l’on puisse dire, c’est que les premiers échanges ne sont pas de tout repos…

« Miss Strauss, vos histoires de réchauffement de la planète et de disparition des espèces, tout ça, c’est sans doute vrai, mais je vais vous dire un truc, ici le problème c’est pas de savoir s’il restera des putains d’ours polaires dans trente ans, le problème c’est de savoir si nous aurons encore du boulot quand Uber aura obtenu sa licence. C’est ça la vérité. »

Un fait divers et un acte héroïque de Nick vont changer la suite de leurs aventures…

Le football mais pas que

A l’instar de Les poteaux étaient carrés, le football est présent tout au long de l’intrigue. Comment peut-il en être autrement. Liverpool, les Reds et le mythique You Never Walk Alone, l’hymne des supporters.

« Ces scènes de terreur, ces visages apeurés, ces regards désemparés, c’est corps tremblants et l’idée de la mort qui s’insinue progressivement dans les esprits, le supporter des Reds les avait déjà croisés. Le souvenir d’Hillsborough envahit soudain son esprit et la cacophonie dramatique formée par le chevauchement des sirènes, du crépitement du feu et des cris d’effroi, fut un instant éclipsée par le silence de la nuit. »

Toutefois, le roman ne se cantonne pas qu’au milieu sportif. Il aborde des sujets du moment (politique avec le Brexit, douloureux avec la tuerie du Bataclan ou le drame de Hillsborough) ainsi que les faits et coutumes « typically British » (le protocole avec la Reine par exemple)

Laurent Seyer résidant une partie de l’année en Angleterre connait bien ces us et coutumes. Cela se ressent parfaitement dans son intrigue. Entre humour et pique, s’immiscent tendresse et émotion. Les personnages en sont d’autant plus attachants et la lecture agréable.

« Chacun d’entre eux avait trouvé une faille dans ses propres carcans pour communier avec l’autre, sans avoir besoin de renoncer à ce qu’il ou elle était, ni prétendre qu’ils allaient un jour se ressembler. »

Une belle confirmation

Il est de notoriété que confirmer un succès n’est pas chose aisée et que le second roman est souvent une marche infranchissable. Ce conte franco-britannique y parvient aisément tant il est convaincant et se lit facilement.

L’écriture de Laurent Seyer est toujours aussi agréable et belle. Là encore, elle est totalement en phase avec les caractères des personnages. Plutôt ampoulée et grandiloquente quand Naomi entame son interview, carrément brute et orale quand Nick lui répond.

« C’est ainsi qu’ils faisaient chambre à part tout en continuant à dormir dans le même lit, magnifiant ainsi l’utilitarisme anglo-saxon dans leur vie conjugale. »

J’ai dévoré les 200 pages, le sourire aux lèvres et le légendaire You never walk alone en permanence dans mon esprit. J’ai aimé la manière dont Laurent Seyer a construit son histoire, d’apparence légère et pour laquelle il a introduit de nombreux rebondissements. J’ai aimé ses personnages o combien intéressants et fascinants qui mettent à mal les préjugés et les caricatures. J’ai été conquis par la manière dont il a su rendre l’impossible possible, cette passerelle entre le chacun chez soi et le vivre ensemble prônés par les deux parties.

Comédie sans prétention politique et toujours à forte connotation footballistique, Ne plus jamais marcher seuls nous offre une belle réflexion sur notre société contemporaine.  Avec ce deuxième roman plus complet, Laurent Seyer confirme ses talents d’écrivain.

Je vous recommande ce court opus pour vous évader ou revisiter des moments si proches… si lointains… grâce à cette belle fable.

Mention spéciale au titre, sublime trouvaille et lien entre tous les éléments… Bons frissons !

4/5

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