On connaissait les reportages TV avec des journalistes incorporés dans l’équipe d’un candidat et suivant en continu la campagne présidentielle.
On connaissait les livres, comme par exemple celui de Yasmina Reza en 2007 L’aube le soir ou la nuit » racontant le quotidien de la campagne de Nicolas Sarkozy.
Cette année, je vous conseille très fortement Le journal du OFF – Dans les coulisses d’une campagne folle » une bande dessinée aux éditions Glénat de Gerschel – Saint Cricq – James.
La politique comme on l’aime: humour, ironie et dérision. Le journal du Off est une réussite qui apporte un regard neuf et différent.
Il vous éclairera tant les auteurs sont bien informés et divertira sans aucun doute. Mention spéciale aux dessins très travaillés. Il ne vous demandera pas beaucoup de temps car l’intrigue est fluide et l’intérêt avéré. Le pire dans tout cela ? C’est que je suis certain que tout ce qui est relaté est véridique.
Peu coutumier des BD mais acteur connaisseur du monde politique, je me suis régalé et j’ai souvent eu le sourire aux lèvres.
Mais qu’est ce qui a donné envie aux auteurs de faire une bande dessinée? comment s’y sont-ils pris?
J’ai eu la chance d’interroger Renaud Saint-Cricq que je remercie infiniment pour le temps qu’il nous a consacré.
Bonjour et merci Renaud d’avoir accepté de répondre à quelques questions sur cette formidable bande dessinée. Avant toute chose, Pourquoi une bd?
Ce projet est né d’une envie assez simple. Avec Frédéric Gerschel, on voulait faire un livre sur la présidentielle. S’est alors posée la question du comment. La bd cochait plusieurs critères: c’est un support moderne, il est facile d’accès, et pour des journalistes comme nous, il permet de raconter les choses différemment de ce que nous faisons généralement.
Pourquoi le off?
Parce que raconter, ou « craquer », le off, c’est ce qui permet d’emporter le lecteur derrière la scène (ou le décor) de la pièce que les candidats et leurs équipes lui jouent. Il y a un intérêt journalistique et une vertu pédagogique à montrer l’autre visage de la campagne, celui qu’on ne voit pas. Montrer le « off » – l’ensemble de ces phrases/discussions que les politiques livrent aux journalistes hors du cadre des caméras ou loin des micros – permet de rendre compte des stratégies des candidats, des petites bassesses, des espoirs ou des craintes des candidats. Enfin, il y a aussi un côté amusant à observer ce théâtre et à y mettre une caméra (en l’occurrence, un dessinateur).
Pourquoi trois auteurs?
Un exercice à trois…puis à 10 L’écriture de cet album a commencé à 3: Frédéric et moi au scénario, James au dessin. Et puis Frédéric a un eu un grave accident en Irak, où il travaillait pour le Parisien. La question s’est posée d’arrêter la BD, et on a décidé de la continuer avec des amis communs, une petite troupe de journalistes politiques fabuleux. C’est devenu une aventure humaine autant qu’un challenge. Ils m’ont donné des infos, j’en ai récupéré d’autres, et avec toute cette matière, j’ai pu faire cet album avec James, et on a pu le signer tous les 3 avec Frédéric. C’était important. Sans eux, rien n’aurait été possible.
Liberté d’expression vs Censure: Des éléments ont-ils été censurés? ou auto-censuré?
Aucune censure. Il n’y avait pas de raison. La seule chose que je me suis interdite, c’est d’aller dans la vie privée, ou de relayer des rumeurs. Nous avons fait une BD politique, avec des informations toutes vérifiées: c’est ce qui nous a guidé dans nos choix et notre écriture, et rien d’autre. Après, il faut parfois trancher entre telle ou telle info, faute de place pour la scénariser ou de temps pour la dessiner. Mais ça fait partie de l’exercice. Et nous avons travaillé dans la plus parfaite tranquillité: personne n’a jamais essayé d’intervenir.
Les dessins sont beaux et explicites. Un gros travail?
Oui il y a eu un gros travail de dessin. Faire cette bd, c’est un défi de scénario sans doute – il faut au moins avoir les infos 🙂 -, c’est un défi de fabrication – il a été imprimé et relié en 3 jours, un délai hallucinant pour de la bande dessinée, et c’était aussi un défi pour James. Faire 120 pages de dessins, avec autant de décors et de foule, en quelques mois, c’est une sacrée réussite. Les dernières semaines, il dessinait 16 heures par jour. Et il a rendu le dernier dessin à l’imprimeur le mardi 9 mai à 6 heures du matin, après une dernière nuit blanche.
Le journal du OFF, une BD à lire sans modération
5/5
Voilà qui est bien tentant !