Période estivale oblige, chacun y va de sa petite liste de lecture conseil. Je ne pouvais bien évidemment pas rester sur le bas côté de la route, mais une fois n’est pas coutume, je vous propose quelque chose de différent avec le livre de Vincent Monadé Comment faire lire les hommes de votre vie.
Je remercie les éditions Payot et Rivages pour la version électronique du livre.
« Il suffit d’une rencontre entre un homme et un livre pour que celui-là se mette à lire et ne s’arrête que mort, regrettant d’avance tous ces romans pour lesquels il aura manqué de temps »
Cette phrase vous est familière? (coucou Philippe de la formidable Maison de la presse de Mérignac Mondésir). Certes, j’admets que nous sommes plus habitués à des phrases « Lire, faire lire ses enfants, les inciter à se faire leur propre opinion par les livres, leur faire découvrir les merveilles de la littérature classique française » grâce aux nombreuses et régulières campagnes de sensibilisation.
« C’est cela, lire. Ce n’est que cela. Un acte d’amour. »
Ici, Vincent Monadé, grand passionné, innove pour faire transmettre son message et son amour du livre. Il prend un sujet aussi hilarant que sérieux: pourquoi les hommes ne lisent jamais de romans? Pourquoi sont-ils attirés par tout sauf cela? Attention, il nuance d’emblée son propos et précise qu’un homme lit: l’Equipe, journal de référence par excellence depuis des décennies et pour des décennies. Et premier sourire aux lèvres. Ce ne sera pas le dernier, j’irai même jusqu’à écrire qu’il ne m’a jamais quitté durant la grosse heure passée à tourner les pages.
« L’homme est ainsi fait que, dès l’âge de douze ans, l’essentiel de ses neurones se concentre entre ses jambes et son ventre, où se niche la ridicule excroissance dont il tire tant de fierté, convaincu que là se joue le sort du monde. Écrasé par la honte au moment même où j’écris ces lignes, mais convaincu que mon devoir est à ce prix, je vous enjoins de tirer parti de cette faiblesse. «
Dans de courts chapitres, que l’on pourrait comparer à des consultations médicales, tous structurés de la même sorte: un titre humoristique (le but de la séance), une présentation (le sujet à traiter), la méthodologie (l’ordonnance) et la liste de lecture (les médicaments), l’auteur va donner toutes les ficelles pour que Chéri lise. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est parfaitement réussi. Tout est bien trouvé: la liste pour l’appâter, celle pour l’apprivoiser et enfin celle pour lire ensemble. Important le partage, important d’encourager chéri, lui montrer qu’on apprécie aussi ces moments là.
Le sens de la formule, l’humour omniprésent, les situations aussi ironiques qu’ubuesques font tourner les pages rapidement et empêchent de reposer l’ouvrage avant de l’avoir terminé. Les fous rires sont fréquents, à commencer par les titres des différents chapitres. Quelques exemples au hasard: L’agent double (utiliser sa mère), Lire c’est jouir (de la littérature érotique), La parade du coq (le repas de famille et le dîner mondain comme armes absolues).
« Rassurez-vous! Inutile, pour faire de lui un Jean d’Ormesson érudit et drôle, de rédiger des notes de lecture pour la Revue des Deux Mondes au salaire horaire de Paul Pogba. Aux prochaines vacances d’été, vous ne le verrez plus. claquemuré dans votre location, transpirant par 60 degrés au soleil sous la tente, il lira Guerre et Paix comme autrefois l’Equipe – passionné, furieux, acharné. L’homme est un être simple »
Enfin, mentionnons qu’ancien libraire lui-même, il n’a pas oublié tout ce que cela lui a apporté et leur rend un hommage vibrant tout au long de sa prescription.
« Pousser la porte d’une bonne librairie, c’est embarquer pour un voyage au long cours. on en revient changé, toujours. vous le savez, vous qui fouinez depuis des années dans celle où votre cœur vous porte, qui vous sentez, chaque fois que vous entrez dans une autre, chaque fois que vous achetez un livre sur internet, comme une femme infidèle, vaguement coupable mais heureuse d’être capable d’aller voir ailleurs. Vous dites encore mon libraire, quand depuis belle lurette il ne vous viendrait plus à l’idée de dire mon Zara ou mon H&M. On vous connaît dans cette librairie, on vous reconnait. on sait vos gout »
Laissons le mot de la fin à Vincent avec les ultimes phrases de cette petite perle aussi passionnante que captivante:
« C’est cela la raison profonde de ce livre. Partager cette chance formidable de n’être jamais seul, de n’être jamais sans quelqu’un qui pose sa main sur mon épaule, me serre dans ses bras. mes meilleurs amis sont des livres qui m’ont marqué et auxquels je reviens, ceux que j’ai déjà évoqués et d’autres, […] Ces livres sont, peut-être, ceux que j’emporterai en exil. Je les chéris et les relis. Ils sont mes meilleurs amis, ceux qui survivront aux naufrages, aux ruptures, au temps. »
Je partage, je valide et je transmets à mon tour. N’hésitez pas, acheter Comment faire lire les hommes de votre vie que vous soyez grand lecteur, « livrophobe » ou simple curieux. Je vous garantis que vous en ressortirez heureux et avec l’envie de foncer chez votre libraire préféré, tant c’est facile à lire et drôle. Et que votre pile à lire aura grimpé de quelques décimètres… Merci Vincent.
4,5/5