Je m’appelle Blue est le premier roman de Solomonica de Winter, jeune auteur d’à peine 18 ans.
“Excitant comme un thriller. Poétique comme une histoire d’amour” nous prédit le bandeau publicitaire autour du livre. Ajoutez les très bonnes chroniques des Explolecteurs lors des explorateurs de la rentrée littéraire avec Lecteurs.com, et vous comprendrez aisément que cette lecture devenait indispensable.
3 parties, un peu plus de 50 chapitres et 224 pages plus loin, on frôle le coup de cœur ! Quelle claque, quelle maitrise époustouflante et surtout quelle maturité. Je rejoins sans aucun souci la liste déjà longue et qui continuera à n’en pas douter à augmenter des lecteurs conquis par Solomonica de Winter.
Je m’appelle Blue est l’histoire d’une jeune fille de 13 ans traumatisée par la mort tragique de son père lors d’un braquage. Heureuse avec Daisy et Ollie dans sa jeunesse, tout vire à la catastrophe : son père meurt, sa mère se drogue, Blue se retrouve délaissée. La vie de Blue se résume désormais à deux obsessions : tuer James pour « venger son père Ollie » et le livre que ce dernier lui a offert : le magicien d’Oz dont la lecture lui permet de survivre en s’évadant, échappant ainsi à la difficulté de sa vie réelle.
C’est comme ça, en lisant et relisant simplement mon roman, en m’imaginant dans le pays d’Oz que j’arrivais à la fin de la journée. Mon seul passe-temps, mon seul espoir, c’était la lecture. « Continue simplement à lire, je pensais, et tu finiras par te retrouver dans cet autre monde, Blue. La lecture aura tellement rempli ton cœur qu’il explosera et flottera dans les airs, au-delà de l’arc en ciel, jusqu’au pays d’Oz, et qu’il t’emportera avec lui. Si tu veux survivre à ta tristesse, lis ».
Murée dans le silence depuis 5 ans, elle choisit de se confier au docteur par écrit et c’est ainsi qu’on apprend à connaitre Blue : ses pensées, ses rêves, ses fantasmes mais aussi ses pulsions, ses envies de meurtre, sa violence et ses démons. Tout va crescendo, et le jeu de Solomonica avec le lecteur est fascinant jusqu’à la chute finale.
C’est merveilleusement bien écrit. L’auteur alterne entre les codes du polar : écriture réaliste, dynamique, parfois abrupte et sèche, vulgaire faisant ressortir violence et haine.
Ma folie était un bouclier de protection au-dessus de mon vrai moi, camouflant mon secret (je n’étais pas folle, c’était bien moi la coupable). C’est alors que j’ai été positivement sûre que je le tuerais.
Et les phrases belles, travaillées, poétiques pour bien montrer l’ambivalence de Blue.
Je suis une fille sans mots, mais mon esprit n’est pas lent. Mon esprit n’est ni terne ni creux. Regardez mes yeux et vous y trouverez un univers infini, une tempête, une machine qui ne s’arrête jamais. Je suis toujours en train de penser. Je me contredis souvent. Je suis folle, je suis saine, je suis meurtrière, je suis innocente. J’en suis bien consciente. Mais je n’y peux rien si mes pensées fluctuent avec mon état d’esprit. Comme les rides sur l’eau, en fonction de la force du vent. L’eau qui coule ne s’arrête jamais.
J’ai plongé mes yeux dans ceux de Charlie, aux iris constellés de gouttelettes d’or, et j’ai eu l’impression de nager en eux. C’était horrible d’observer leur désespoir, comme si des poissons noirs tournaient frénétiquement derrière ses pupilles. Je savais que je ne pouvais rien faire pour les apaiser, parce que j’étais la cause de son désespoir.
C’est très agréable à lire et ça incite le lecteur à dévorer le roman.
La violence, la haine, l’amour, la pauvreté, les traumatismes, la peur, la joie, la tristesse, … tous ces thèmes sont parfaitement traités par Solomonica de Winter, ce qui donne un côté très réaliste au roman.
L’amour est la chose la plus forte que nous ayons, la plus puissante, il peut détruire ou créer, faire ou défaire. On ne veut pas la haine, on ne veut pas la peur, mais on vit dans un monde où ces sentiments sont le produit de la destruction que l’amour peut engendrer, des cœurs qu’il peut briser. Chaque fois que tu ressentiras de la peur, je veux que tu te souviennes de ceci : ton amour peut détruire ta peur. Ne le laisse pas détruire ton courage.
De même, le parallèle avec le monde imaginaire et enchanté du magicien d’Oz (encore plus marqué avec le titre original du livre Over the Rainbow) contrebalance la noirceur et la folie réelle de Blue. Ou quand fiction et réalité sont indissociables …
Je ne regrette finalement qu’une chose : que le roman ne soit pas un peu plus long…
Je m’appelle Blue est un excellent 1er roman totalement maitrisé, aussi fort que déroutant et dérangeant. Bref pour un coup d’essai, c’est une vraie et belle réussite !
4,5/5
Citations:
- Je lui ai tourné le dos et je me suis éloignée. IL fallait que je le fasse. Sinon je serais tombée morte. C’était un moment de beauté pure et insoutenable. Pendant tout le chemin jusqu’à la maison, son nom s’est réverbéré dans mon esprit jusqu’à ce que j’en aie le vertige. J’imaginais des pétales de roses sortir en flottant de la bouche de tous ceux qui le prononçaient. J’imaginais leur langue ivre de miel.
- Il hurlait, et pourtant sa voix semblait faible, comme avalée par les immeubles qui se dressaient autour de nous. Je me suis arrêtée. J’ai regardé sur ma droite. J’ai vu mon reflet dans une vitrine. J’ai remarqué que j’étais en larmes. Là, debout, une petite poupée sombre dans la neige. La neige si blanche qu’elle illuminait mon obscurité. Quelle vision ! Quelle vision horrible. Puis je me suis tournée vers lui. Il avait l’air tellement innocent, toujours assis au même endroit. Mon estomac s’est tordu et noué, mon cœur était en feu, mes lèvres me picotaient, j’avais chaud à la tête, mon crâne était lourd. Il fallait que je dise quelque chose ou j’allais mourir.
- Je jouais si bien la comédie. C’est ce jour-là que j’ai compris que j’étais diabolique. Parce que j’étais capable d’aimer, j’étais lucide, j’avais une morale, je connaissais la ligne de partage entre le bien et le mal, je savais distinguer ce qui est éthique de ce qui ne l’est pas. Mais je l’ai fait quand même. Et ça, c’est mal./li>
ah génial, j’ai tellement hâte de le lire 🙂 son père est également écrivain (Leon de Winter) et j’aime bien ce qu’il écrit.
Beaucoup apprécié ce premier roman. Surtout à l’age de l’auteur…Une vraie prouesse!
je n’avais pas encore entendu parler de cet texte, prometteur!
Oui à ne pas rater 😉
Bonjour,
Comme vous j’ai vraiment apprécié ce roman et vous en parlez très bien !
Je vais publier ma chronique dans quelques temps mais déjà sachez que ce livre m’a bouleversée….
Bonne fin d’année livresque….