Les heures envolées – Alba Ombieri

0
Les heures envolées Alba Ombieri Des livres et du rêve
Les heures envolées Alba Ombieri Des livres et du rêve

Entre secrets, mémoire et reconstruction

Parler d’un premier roman est toujours délicat, surtout lorsqu’on en a suivi de loin la gestation. J’ai laissé passer du temps avant de poser mes mots. Une certitude pourtant s’est imposée dès la dernière page : une réussite.

« Elle se détourna et remonta sur son étalon tandis qu’au loin, la cloche des pompiers annonçait leur arrivée imminente. Elle lança Olympe au galop et disparut dans le bois sans que personne ne l’aperçoive, tout en songeant que son geste parricide avait mené à la mort d’un innocent. »

Une fresque familiale au cœur d’une France bouleversée

Ancré au début du XXᵉ siècle, le roman fait dialoguer fractures sociales et blessures intimes, sur fond de Première Guerre mondiale. On suit trois personnages : Élise, François, Valentin. Tous cherchent à se reconstruire, chacun à leur manière, face aux non-dits, au poids du passé et aux mutations du monde qui les entoure. Alba Ombieri parvient à inscrire les trajectoires individuelles dans la grande Histoire sans les réduire à de simples archétypes.

« Mon regard se pose sur un groupe de femmes, tout de noir vêtues, veuves discrètes, qui discutent dans un coin calme, le teint pâle et les yeux tristes. »

Des personnages fracassés et attachants

Le roman s’ouvre de façon marquante sur l’accouchement éprouvant d’Élise, jeune fille issue d’une famille bourgeoise, écrasée par une mère violente et un père intransigeant. Son drame intime se double d’une liaison interdite avec le fils de l’employé familial, ajoutant à l’opprobre et à la douleur. François et Valentin, tout comme Élise, dévoilent progressivement leurs zones d’ombre et leurs tentatives de survie : l’autrice donne à chacun une véritable épaisseur, rendant l’ensemble profondément humain. L’intime ne se dissout jamais dans le didactique : il reste incarné, concret.

« le coeur battant, il ne pouvait quitter des yeux le morceau de papier qui lui rendait sa liberté et la possibilité de poursuivre sa quête. le ciel se dégageait à l’horizon. Personne ne pourrait plus se mettre en travers de son chemin, entre lui et son désir de vérité. »

Une plume sensible au service de l’émotion

Alba Ombieri adopte un style délicat, attentif aux nuances émotionnelles et aux silences. Elle choisit la retenue, préférant suggérer plutôt qu’exhiber. Jamais de sentimentalisme : une écriture pudique qui émeut par sa justesse. Malgré quelques longueurs, l’ensemble conserve une unité forte entre le fond et la forme.

« Pour tous, il était un blessé de guerre. Une gueule cassée. Un héros sacrifié pour la nation. Il avait tu son histoire, avait mimé l’amnésie, assurant même ne plus connaître son identité. »

Premier roman maîtrisé et sensible, Les heures envolées plonge dans l’intime bouleversé par l’Histoire et révèle une voix déjà affirmée.

Une réussite qui appelle déjà la suite.

Les heures envolées est publié aux éditions Des livres et du rêve

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici