Les sirènes noires – Jean Marc Souvira

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LesSirenesNoires

Les sirènes noires est le dernier livre de Jean Marc Souvira. Il sort aujourd’hui, 12 novembre 2015.

Je remercie les éditions Fleuve (et Fleuve Noir) ainsi que Babelio pour cet envoi et la très intéressante rencontre avec l’auteur jeudi passée (un billet est à venir sur le blog).

J’avais entendu parler de cet auteur mais je n’avais jamais eu l’occasion encore de le lire. Cette remarque est désormais du passé et j’ai depuis acheté (et fait dédicacé par Jean Marc Souvira) les deux premières enquêtes de Frédéric Mistral, son alter égo flic, tellement j’ai été conquis et enthousiasmé par ce 3ème opus. C’est sans contestation un nouveau coup de cœur.

Très réalistes, les sirènes noires se dévorent tellement le rythme est haletant et le contenu est passionnant. Intrigues, personnages, action, écriture, style, adrénaline, vous l’avez déjà compris j’ai tout apprécié dans ce polar.

Le livre nous conte le quotidien des flics du 36, quai des orfèvres. Frédéric Mistral a 4 enquêtes à mener de front, toutes distinctes en apparence : jeunes filles africaines à qui on promet la belle vie à Paris et qui sont prises au piège d’un réseau de prostitution (les fameuses sirènes noires), violeur psychopathe et meurtrier, assassinats sordides et démembrement de pauvres victimes albinos, assassinat d’une prostituée de luxe. C’est clairement basé sur du vécu, c’est violent même si c’est romancé. C’est ce qui donne tout l’intérêt pour moi de ce polar si différent de l’habituel.

Certes on peut regretter qu’une enquête n’ait pas de suite et se demander pourquoi l’auteur en a parlé si ce n’est pour perturber son lecteur. Mais cela permet d’avoir une vision très pragmatique du difficile travail d’un commissaire de police et de son équipe aujourd’hui. A l’heure où les séries TV (françaises ou américaines d’ailleurs) falsifient les choses, les sirènes noires permettent de bien remettre les faits dans leur contexte.

L’écriture est sèche, directe, ciselée, sans superflu ni élément perturbateur. La vérité, rien que la vérité. Les faits, rien que les faits. Elle n’est pour autant pas dénuée d’émotions, ni d’empathie (on déteste certains, on se prend d’affection pour d’autres, on souffre…). Elle s’adapte aux personnages (du dialecte africain au parler « d’jeuns »). Elle exprime parfaitement les états d’esprits des différents personnages.

Les faits sont rapportés de manière brute, ce qui exacerbe la dureté et le caractère si réaliste de ce livre. C’est fort, dur, limite supportable souvent. On est réellement en immersion dans l’enquête, au côté des commissaires et autres policiers.

« Des mecs et des gonzesses partout. Les filles hurlaient, hyper agressives, les mecs roulaient des mécaniques, prêts pour la baston. Il a fallu en sécher deux ou trois pour calmer un peu le jeu. T’imagine ? Un début de bagarre générale éclairée à la lampe torche ! La pire, c’était la mère maquerelle, Justina. Elle hurlait dans leur dialecte et ça électrisait tout le monde. J’ai dû l’attacher pour qu’elle se calme. Bien entendu les autres familles africaines nous sont tombées dessus. La BAC est venue en renfort, j’avais prévu le coup, et tout s’est calmé. »

Le style est très descriptif, très évocateur et précis. On n’a aucun mal à imaginer la scène, se représenter chaque détail, à frissonner, à détester ou à compatir. L’auteur accorde une importance particulière à décrire avec soin l’environnement et les faits. Il ne laisse ni flou, ni ambiguïté, ni n’autorise d’autres interprétations au lecteur. Peu de surprise dans ce polar.

« Il s’isola et, fidèle à son habitude, ferma les yeux pour s’extraire de la nef des fous dans laquelle il naviguait. Il parla longtemps avec son épouse. Les yeux fermés, il devinait son parfum. Un parfum qui n’existait pas dans le commerce, qu’elle n’avait conçu que pour elle, en parlant avec son mari, si sensible aux odeurs. Mistral ouvrit les yeux, raccrocha la communication et mit quelques secondes à se replonger dans l’univers hallucinant de la maison du sorcier. »

La plume est sans concession. On se retrouve happé par les journées et les nuits de Mistral, captivé par le déroulement des enquêtes et ce souhait de savoir. C’est addictif et un pur concentré d’adrénaline. Il est impossible de lâcher le livre.

L’auteur connait son métier et ça se voit (mention spéciale sur les analyses ADN par exemple), ça se lit et se ressent en tournant les pages. Quel bonheur !

L’écrivain s’autorise même quelques piques sur le métier « de la vraie vie de l’auteur » comme l’atteste la citation suivante. C’est subtilement écrit et criant de vérité.

« La discrétion, on s’en fout ! Tout le monde parle à tout le monde. Le secret de l’instruction ? Vaste fumisterie, les journaux en sont remplis, et le public en raffole. Les flics sont toujours pointés du doigt et les premiers à morfler, alors que ça bavasse dans tous les coins. Et pour l’instant, il n’y a pas de juge d’instruction, donc pas de violation du secret de l’instruction. Le procureur ? Le secret de l’enquête ? J’en fais mon affaire. »

Vous l’aurez je pense compris, il ne faut absolument pas passer à côté de ce livre. Il se lit comme on regarderait un épisode d’une série ou un documentaire sur le 36. Il se déguste sans modération et je vous le conseille très vivement. En ce qui me concerne, je vais plonger dans les deux premières enquêtes de Mistral.

5/5 COUP DE COEUR!

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