Anne F. – Hafid Aggoune

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AnneF

A l’occasion de la rentrée littéraire 2015, Hafid Aggoune publie Anne F. Pour de multiples raisons que je garderai pour moi, cet opus ne pouvait être que le dernier ouvrage lu et chroniqué de 2015. Et comme prévu, comme anticipé, comme deviné, surtout comme escompté et espéré, c’est un énorme coup de cœur émotionnel.

Ayant eu le grand bonheur de rencontrer et de sympathiser avec l’auteur lors du salon du livre de Brive, et en gardant un souvenir mémorable de ce moment, il me tardait de découvrir son dernier opus. Vu la couverture, vu le thème, vu les événements de cette fin 2015, cela s’annonçait comme un moment compliqué mais salvateur. Je le dis d’emblée, je n’ai pas été déçu!

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Anne, si les beaux soirs peuvent encore exister et donner vie à des nuits de paix, et que les jours se succèdent pour laisser aux Hommes de bonté la force de rebâtir sur des ruines, alors toi et tous les peuples réduits en cendres en en larmes aurez donné votre part pour fertiliser le monde et le reconstruire inlassablement.

Oui ces phrases résonnent étrangement et douloureusement.
Oui cet ouvrage prend une drôle de signification quand on a vécu et subit les événements de Janvier et Novembre dernier.
Oui Hafid nous offre un superbe message de paix, de tolérance, d’espoir et surtout de vie… Se souvenir du passé pour ne pas renouveler les erreurs (vaste chimère? utopie? espoir?, …), le pouvoir et la force des mots en direction des jeunes.

La paix naîtra lorsque les hommes et les femmes chercheront l’Autre dans le miroir.

Anne F. est une lettre rédigée durant sa dernière nuit par le narrateur qui veut en finir avec la vie à Anne Franck, sa petite sœur.

C’est à l’époque du début de mon Journal que tu es devenue ma petite sœur, sœur d’écriture, sœur de solitude, sœur dans les moments difficiles, sœur dans cet amour pour l’école que je ressentais dans mon profond et sincère respect pour celles et ceux qui nous enseignent, et plus tard dans mon amour pour les bibliothécaires, les libraires, les éditeurs, et tous ceux qui œuvrent autour des livres, les miens, ma famille, celle que j’ai choisie.

C’est l’histoire revisité de Anne Franck… mais aussi du père de cette dernière… mais aussi de celle du narrateur… mais aussi du père du narrateur (la comparaison entre l’écrivain et le marathonien est sublime)… Bref, de multiples histoires de vie sont narrées dans ce livre. Elles se ressemblent toutes, elles se rapprochent, elles se confondent. S’y ajoutent des messages forts sur l’importance et la beauté de la vie, sur le rôle des enseignants, sur la culture en général et le besoin de cette dernière pour instruire, enseigner la littérature et combattre les horreurs.

Les enseignants sont les gardiens de la liberté, de l’égalité et de la fraternité, cerbères du temple, architectes de la société à venir, ceux à qui a été confiée une tâche immense dans un monde multiethnique, multiconfessionnel, complexe, illisible, pour qui se contente du conformisme, de l’évidence, de l’apparence.

Émotionnellement difficile, très émouvante et souvent bouleversante, l’écriture de Hafid Aggoune est délicieuse. De longues phrases fluides, recherchées, détaillées, si poétiques; un style riche et travaillé pour être à la fois compréhensible et explicite; des chapitres courts alternant entre la vie de Anne Franck, celle du narrateur ou des pères de l’un ou de l’autre… l’auteur fait un sans faute dans la construction de son livre. J’ai vraiment beaucoup apprécié et ai dévoré chaque ligne avec délectation. On ne peut qu’être touché, ému. Il est réellement impossible de rester indifférent à tout cela.

On aimerait ne pas être aspiré par l’oubli. on laisse une part de soi, dans un enfant, un livre, des projets. On éduque, on écrit, on construit pour ne pas disparaître, pour que nos jours aient un sens, pour que quelque chose de beau nous arrive.

Coup de cœur incontesté et incontestable, ne passez pas à côté de Anne F. A lire, à relire, à conseiller, à transmettre!

C’est une lecture très forte qui invite à redécouvrir Anne Franck mais aussi à être humble, à ne pas oublier la tolérance, les valeurs républicaines de notre nation, l’ouverture aux autres, le vivre ensemble, chacun avec ses singularités ou ses différences. Pour ce fabuleux hymne à la vie, au courage, à l’ouverture d’esprit, je n’aurai que deux mots pour conclure cette chronique: Merci Hafid!

5/5

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