Le triangle d’incertitude – Pierre Brunet

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Le triange d'incertitudes

Beaucoup de livres sortent à l’occasion des rentrées littéraires de Septembre, et certains restent plus ou moins dans l’ombre. Lorsque Dominique m’a proposé de lire Le triangle d’incertitude, elle m’a précisé que les avis étaient partagés. Ce livre était assez clivant, ce qui m’a motivé je le reconnais volontiers à accepter sa proposition.

Je remercie donc Lecteurs.com et les éditions Calmann-Levy pour cet envoi.

« L’indifférence est l’ombre qui accompagne chaque pas de la cruauté. Elle est l’ombre qui accompagne chaque pas des damnés »

J’ai eu beaucoup de mal à lire ce livre. J’ai néanmoins persisté, mis plus de 10 jours à parcourir les 270 pages et suis heureux de l’avoir terminé. Lors du webinaire de la rentrée de Netgalley, Calmann-Levy m’avait conseillé d’aller au bout, ce que je fais quasi systématiquement avec mes lectures. En découvrant le dernier quart du roman, j’ai compris pourquoi. La fin, plus légère, plus « page turner », faisant littéralement retomber la pression dans laquelle le lecteur est maintenu jusque-là, permet de tourner la dernière page le sourire aux lèvres et avec une sensation de bien-être.

Malheureusement, ce ne fut pas mon cas durant le reste de l’ouvrage. Entre le vocabulaire marin, très technique auquel je ne comprends pas grand-chose et les multiples allers/retours entre passé et présent, parfois sans liant et de manière abrupte, fouillis, j’ai réellement eu du mal à rester concentré de longues durées. Mes séances de lecture étaient souvent brèves et éprouvantes.

« Ce n’était pas celle de n’importe quel bateau pris dans une baston. C’était celle de Gilliatt, avec qui il faisait corps depuis douze jours, son confident, son ami. Gilliatt ne voulait pas les tuer. Gilliatt se battait lui aussi, à leur côté. Gilliatt était un frère d’armes qui luttait et souffrait comme eux. »

Et pourtant, cette alternance entre narration et le journal de bord de Gilliatt étaient prometteur. Il annonçait une double vue aussi complémentaire qu’intéressante dès les premiers chapitres.

Qui est vraiment Etienne ? Pourquoi a-t-il l’air si perdu ? Pourquoi ce voyage au large, seul, contre vents et marées ? De quoi est-il coupable ? ou plus exactement se sent il coupable ? Pourquoi cherche-t-il la rédemption ? Pourquoi une telle perte de confiance, de telles idées noires ?

« Je ne sais pas pourquoi j’écris sur le livre de bord. On n’est tenu d’écrire le libre de bord que lorsque l’on navigue, et au moment de quitter le port et d’y revenir. Peut-être ne-puis-je plus m’en passer. Ma tête doit avoir besoin de se vider. J’ai probablement une voie d’eau quelque part, au fond de l’esprit. Il me faut écoper chaque jour et rejeter sur ces pages ce que la pompe de cale de ma raison ne parvient pas à écluser. »

La taille des chapitres, tout comme leur contenu, sont inégaux. Certains sont clairement trop longs, d’autres extrêmement durs et éprouvants, quelques-uns auraient surement mérité quelques développements supplémentaires…

L’écriture est plaisante, ni trop littéraire ni trop légère, mais comme je le mentionnais plus haut souvent technique (choix voulu et assumé par l’auteur semble-t-il vu la persistance tout au long de son intrigue. On adhère ou pas, mais on ne peut que saluer les qualités de l’auteur). C’est dans l’ensemble bien construit et maîtrisé, même si j’ai personnellement des réserves sur les choix adoptés. J’ai apprécié les descriptions de guerre relatives au Rwanda où l’auteur fait parfaitement ressentir son trouble, son émotion, ses peurs et surtout son incompréhension, bien moins celles maritimes.

« Là-bas, nous n’avions couru aucun danger dont le ciel eût à nous sauver, et celui-ci se tint pour le reste du côté des assassins. Les églises où les Tutsis s’étaient précipités par familles entières, croyant y trouver un refuge, furent pour eux des pièges où on les massacra. Quant au ciel visible, il assoiffa les réfugiés de Bisesero et stimula les tueurs les jours de soleil ; les jours de pluie, il glaça de froid les rescapés terrés dans les herbes, épuisés par la faim et la lutte, blessés souvent, fiévreux et promis à la mort au prochain assaut »

Ce n’est pas un livre inintéressant. Je ne dirais pas que je n’ai pas aimé, je ne dirais pas que je suis un fan absolu, mais tout simplement que je n’ai pas accroché et que je ne suis donc jamais réellement rentré dedans. Une déception… mais qui plaira assurément à d’autres. Je serai ravi de lire vos avis, commentaires et d’échanger avec vous.

3/5

1 COMMENTAIRE

  1. Oui beaucoup de termes de voileux ( mais j’y suis de plus en plus confrontée) qui peut rendre la lecture difficile mais un superbe roman sur la rédemption, une approche différente du génocide rwandais et un personnage tourmenté très intéressant qui m’a aussi emmenée dans un beau voyage ( Jersey, Guernesey chez Victor Hugo, sud de l’Angleterre).
    Une bonne lecture pour moi

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